Je vous aimais, terriblement , éditions Sonatine, 21 euros
On entre dans ce livre comme dans un mystère, un tunnel où peu à peu la lumière s’infiltrerait, par faisceaux successifs, éclairant le visage d’une femme aux mille facettes, l’objet de ce récit fascinant et poignant. Le 14 Décembre 1965, Hannah Gavron, universitaire et mère de famille de 29 ans, dépose son petit dernier à l’école, se rend dans l’appartement d’une amie dont elle a la clef, calfeutre les portes et les fenêtres, et ouvre le gaz. Jeremy Gavron est le petit garçon déposé à l’école ce jour-là, il n’a appris la vérité sur cette mort que beaucoup plus tard et part à la recherche de sa mère.
Ce livre est un livre inclassable (comme souvent chez Sonatine) mais passionnant, la quête identitaire d’un homme qui n’a quasiment pas connu sa mère, une investigation aussi minutieuse que dans un polar et un superbe portrait de femme dans toutes ses ambivalences. Lettres, journaux, photos, expriment peu à peu la vérité -et les zones d’ombre- de cette femme libre avant l’heure, auteur féministe au caractère bien trempé, jeune femme pétulante prête à croquer la vie à pleines dents. On chemine en même temps que le narrateur dans la découverte de cette femme en proie aux difficultés de son époque, comme l’ “épouse captive” de son propre livre et on songe au destin étincelant qui l’attendait si elle n’avait commis ce geste fatal, laissant paradoxalement, beaucoup d’amour et autant de mystère. Un livre envoûtant.