L’amie prodigieuse, Elena Ferrante, folio, 8.20 euros
Voilà un livre contrasté et saisissant : le prologue, très accrocheur, intrigue d’emblée : la narratrice reçoit le coup de téléphone de Rino, le fils de son amie d’enfance, Lila, qui est à sa recherche car elle a disparu depuis 15 jours. Lila, 65 ans, s’est évaporée en prenant soin d’effacer toute trace, papiers officiels, ordinateur ; excessive en tout comme à son habitude, elle a même découpé son visage sur les photos familiales : d’elle, il ne reste plus rien.
C’est alors qu’Elena, la narratrice, entreprend de raconter leur enfance ensemble dans un quartier pauvre du Naples des années 50. Sur fond de violence et de règlements de compte, les deux amies font l’apprentissage de la vie. Toutes deux sont douées pour les études mais seule Elena pourra poursuivre dans cette voie grâce à l’insistance de leur institutrice (la famille de Lila ne voulant rien entendre, elle restera “dans la plèbe”). Mais c’est Lila qui est brillante, qui semble manier les concepts comme de vulgaires cubes de jeu et avoir toujours une longueur d’avance sur ses camarades. Personnalité hors du commun, curieuse de tout, créative, elle subjugue bientôt les femmes et surtout les hommes du quartier.
L’ “Amie prodigieuse”, c’est le portrait de cette jeune femme par son amie, qui a l’impression de la talonner en permanence, et aussi l’histoire d’une amitié féminine dans toute son ambivalence et sa féroce rivalité. Dans la même veine que “D’acier” de Silvia Avallone, voici une chronique sociale et intimiste qui peut paraître sans relief au premier abord mais qui distille peu à peu sa magie et qu’on quitte à regret. On a hâte de lire la suite! (“Le nouveau nom”, éditions Gallimard)