Les corps inutiles, Delphine Bertholon, éditions J.C Lattès, 19 euros
C’est peu de dire que Delphine Bertholon ne fait pas dans les bons sentiments : son roman est noir, baignant dans une ambiance glauque, peuplé de personnages fragiles et désabusés. Pourtant, une lueur d’espoir subsiste au sein de ce chaos, car l’auteur a su échapper aux clichés et rendre attachants ses personnages, dont les failles et les faiblesses sonnent juste.
Clémence a 15 ans et se rend à une fête pour la fin de l’année scolaire. Dans une ruelle, un homme l’agresse ; rien ne sera plus jamais pareil…On retrouve Clémence à 30 ans, installée dans le sud, maquilleuse à “La Clinique”, une usine qui fabrique des poupées grandeur nature pour adultes frustrés et fortunés. Solitaire, la jeune femme a perdu le contact avec ses propres émotions ; tous les 29 de chaque mois, elle célèbre un sinistre anniversaire en séduisant un inconnu.
Delphine Bertholon aborde un sujet difficile d’une façon subtile et montre comment une agression peut influencer la construction d’une identité et dénaturer le rapport aux autres ; elle montre comment une jeune fille peut se mettre en danger lorsqu’elle a subi une violence et comme le chemin est long pour se réapproprier son corps et ses émotions. Toujours crue et sans ambages, sans jamais tomber dans la mièvrerie ou les poncifs, l’auteur nous livre une réflexion sur la violence et l’intime, ou comment se reconstruire après une blessure originelle, comment faire confiance à nouveau.